Silence Radio

Épisode 005

Exil Jour 34

"Tu peux pas continuer comme ça".

Dom, une vraie nomade qui m'a abordé à Orléans, pense que survivre l'hiver par mes propres moyens, c'est voué à l'échec.

Jusqu'ici, je n'ai trouvé aucune traces des faux nomades. Rien. Soit ils se sont jamais arrêtés, soit ils ne sont pas passés par là.

Mais Dom me l'a confirmé, elle les as vu.

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Dom est nomade depuis le tout début. Une nomade pure. Elle m'a dit n'avoir jamais pénétré dans aucune comu. Elle m'a entendu et vu arrivé, elle a eu le temps de juger que j'étais inoffensif. Je sais maintenant que ce n'était pas un compliment.

Elle veut construire son bateau pour aller en Bretagne. Des bouts de terre y mènent, mais avec les marées et les Z, c'est chaud.

Et là, elle va mettre son chantier en pause. Rien que pour moi ?

Non. J'pense qu'elle voit en moi un nouveau-né. Un nomade en devenir, qu'il faut former.

"Dans ce qu'on appelait avant «la France», la Bretagne est le seul coin où je ne suis pas encore allée. Mais je veux bien m'accorder un mois pour t'enseigner tout ce que je sais."

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"Un poil d'intelligence d'avoir su rester sur l'eau, mais en hiver, c'est intenable. Et au pic de l'été, y a pas beaucoup d'eau."

C'est rare des gens qui s'expriment aussi calmement. C'est peut-être l'âge. En plus elle m'insulte. C'est limite pareil que si elle me disait que j'flippe trop de cavaler en territoire Z.

"Je les ai vu tes kidnappeurs. C'est con ! Si j'avais trouvé leur cachette : je serai en Bretagne, pendant qu'eux seraient en train de continuer mon chantier."

C'est le seul moment de la soirée où je l'ai vu sourire.

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"Bien serré à 3 sur un ptit canoë. Ils l'ont changé pour un beau navire."

"Mais le pire, c'était leur comportement. Deux êtres avec des airs plutôt réjoui, à côté d'une petite boule de peur. Ça se voyait qu'la p'tite était jamais sorti de sa comu."

Tu m'étonnes. Des gens qui se font passer pour sympa, puis t'emmène je ne sais où, loin de tes proches.

"En tout cas, c'est sûr que c'était pas des nomades. Trop léger en matos. Puis... trop de précautions par rapport à leur environnement. Comme si un Z pouvait arriver à tout moment. Alors que c'est pas le cas. Les Z, ça arrive par accordéon."

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Les kidnappeurs venaient de passer y a une semaine, mais Dom n'en avait rien à faire.

"Tu pourras pas les rattraper. Ils sont partis en mer. C'est juste mort. Comment tu veux suivre une piste en mer sans visu ?"

"Si tu veux y aller, vas-y ! Mais ça me ferait chier d'pas avoir fait ma part sur ton chemin."

En plus, elle ne sait pas que je n'ai jamais navigué en mer.

"Un mois de transfert de savoir-faire. Même entre nous, on se fait ça. Surtout si ça fait longtemps qu'on s'est pas croisé. À naviguer en territoire Z éternellement, on en finit pas de s'améliorer. "

"Ceux qui en ont le plus besoin, c'est des gens comme toi, qui s'exilent ou se font bannir de leur comu. Un compagnon violent, un groupe trop assis sur le pouvoir, ça suffit pour qu'une fuite se produise. Une fois que tu sais te démerder, le dehors devient ton propre terrain."

Et c'est comme ça que démarra ma session avec Dom.

À la prochaine pleine lune, j'pourrais me mouvoir en mode easy.

(J'espère).